Julius Evola et la tradition

Dominique Venner, l’historien, est formel : l’opposé de la tradition, ce n’est pas la modernité mais le nihilisme.
Le nihilisme, est la dévaluation des valeurs, ce qu’a souligné parfaitement un Nietzsche. Mais qu’est-ce que la tradition ? Ce n’est pas le concept  défini comme « un ensemble de pratiques sociales inculquant certaines normes comportementales impliquant une continuité avec un passé réel ou imaginaire ».  Venner la compare à un motif musical, un thème guidant, qui fournit une cohérence et une direction aux divers mouvements de la vie.
Mais, la tradition est-elle la « tradition éternelle » , la « Tradition » avec un grand « T », chère à Guénon, ou une tradition a centrage ethnique, en l’occurrence et pour ce qui nous concerne, un héritage européen. Serait-elle quelque chose de similaire au concept d’ethnicité, c’est-à-dire un « ensemble de normes et de significations tacites qui se sont développées à partir de la lutte pour la survie d’un peuple ». En-dehors du contexte spécifique de cette lutte, il n’y a pas de tradition .
Autre conception de la Tradition, celle de Julius Evola qui voit dans cette dernière une incantation, un monde magique bien plus qu’un concept naturaliste. La Tradition qui fait du monde un monde universel, à la fois céleste et suprahumain, un monde aristocratique, qui a rang et sens. La culture, dans cette conception, se libère de ses éléments historiques et humains et prend une dimension métaphysique dans laquelle l’homme se réapproprie les traits transcendants de l’Homme Traditionnel, porteur d’un héritage. Pour Evola l’homme doit retrouver l’unité éparse dans la division du monde, son souci est l’esprit  qui est latent dans le symbole, le rituel et le mythe. Evola est idéaliste dans le sens le plus platonicien du terme : toute cause visible n’est qu’apparente.
Dans cette conception, l’Etre est à la fois en-dehors et au-delà du cours de l’histoire (c’est-à-dire qu’il est supra-historique), alors que le monde humain du Devenir est associé à un flux toujours changeant et finalement insensé de vie terrestre e. La « valeur suprême et les principes fondateurs de toute institution saine et normale sont par conséquent invariables, étant basés sur l’Etre ».  C’est de ce principe que vient la doctrine évolienne des « deux natures » (la naturelle et la surnaturelle), qui désigne un ordre physique associé au monde du Devenir connu de l’homme, et un autre ordre qui décrit le royaume métaphysique inconditionné de l’Etre connu des dieux.
Les civilisations traditionnelles, affirme Evola, reflétaient les principes transcendants transmis dans la Tradition, alors que le royaume « anormal et régressif » de l’homme moderne n’est qu’un vestige décadent de son ordre céleste. Le monde temporel et historique du Devenir, pour cette raison, est relégué à un ordre d’importance inférieur, alors que l’unité éternelle de l’Etre est privilégiée. Comme son « autre maître » Joseph de Maistre, Evola voit la Tradition comme antérieure à l’histoire, non conditionnée par le temps ou les circonstances, et donc sans lien avec les origines humaines ». La primauté qu’il attribue au domaine métaphysique est en effet ce qui le conduit à affirmer que sans la loi éternelle de l’Etre transmise dans la Tradition, « toute autorité est frauduleuse, toute loi est injuste et barbare, toute institution est vaine et éphémère »


 

 

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